Un oreiller dans le sac à dos
Parfois j’ai envie de partir. Quitter toutes ces choses matérielles auxquelles je suis rattachée et filer là où personne ne m’attend. Débarquer dans une gare , marcher doucement au milieu des gens qui se précipitent dans des bras, dans des bus, dans des taxis, dans des bureaux… Marcher au ralenti… Sentir mes muscles, mes tendons bouger sous ma peau… Promener mes deux pieds sur les trottoirs poussiéreux d’une grande ville. Manger un sandwich sur les marches usées d’un monument et regarder les gens passer. Jouer avec la monnaie, une main dans la poche de mon pantalon.
Mais il y a un problème, je déteste les chambres d’hôtel , je déteste dormir dans un lit qui a reçu mille corps différents… L’idée de m’allonger là où des hommes gras ont caressé les corps fatigués de pauvres filles aux yeux perdus me révulse… Je préfèrerais encore emmener mon oreiller qui sent bon la lessive et le poser sur un banc et poser ma tête dessus, enfouir mon nez dedans, me blottir en serrant mon sac à dos… Mais il y a un autre problème. Le regard des gens me transperce. Alors me réveiller tous les matin transpercée par un regard finirait par me tuer. Et puis il y aurait toujours quelqu’un ému par ma tête blonde et ma figure de petite fille, il y aurait toujours quelqu’un pour croire en moi, il y aurait toujours quelqu’un pour m’offrir une maison, un lit blanc, des fleurs et le ciel bleu.